Les vertus de l’enthousiasme

L'enthousiasme de Churchill

Mais que peut bien faire un billet sur l’enthousiasme dans un blog dédié au Lean 6 Sigma ?

Voltaire disait que « Rien ne se fait sans un peu d’enthousiasme ». Puis, Winston Churchill, beaucoup plus tard expliquera que « Réussir, c’est aller d’échec en échec sans perdre son enthousiasme ».

Une rupture ambitieuse

Un projet Lean 6Sigma est une rupture à plusieurs titres : L’équipe Lean, sous la direction du pilote, est focalisée sur un objectif forcément ambitieux. Car Lean 6Sigma (DMAIC) est le moyen de réaliser une « percée » (le Hoshin des japonais), c’est à dire une amélioration drastique, et non un simple toilettage. Se fixer un but non prioritaire pour l’entreprise, ou un objectif tiède ne motivera personne et conduira à l’échec.

Le pilote (en général un green belt ou un black belt) porte donc une énorme responsabilité dans la réussite du projet. Il est certes le garant de l’application de la méthode. Mais il est surtout celui qui anime le groupe Lean. Présenter la méthode Lean 6Sigma à l’équipe et aux opérationnels concernés, c’est comme lorsque Cortès brûla ses vaisseaux dans le nouveau monde : on ne peut alors plus faire marche arrière.

Car les espoirs placés par les opérationnels concernés sont souvent immenses. Pour une fois, on leur donne la parole. Pour une fois, leur avis compte vraiment. Pour une fois, on ne cherchera pas des responsables, mais des solutions. Pour une fois, ils vont pouvoir mettre en oeuvre leurs idées. Pour une fois, on mesurera le résultat, et tous tireront une immense satisfaction de voir l’objectif atteint, même sans prime, même sans gratification particulière.

Juste pour le plaisir d’avoir réalisé quelque chose.
D’avoir été utile à quelque chose.

Entendu, reconnu, valorisé

Car c’est un des fondements de la vie en société : L’être humain – et donc chaque collaborateur de l’entreprise – veut être entendu, reconnu, valorisé. Il a besoin de pouvoir s’exprimer, de savoir que son avis compte, et de se sentir utile (voir l’article sur les ressorts de la motivation)

Or, la démarche Lean s’appuie précisément sur cette approche : Les membres de l’équipe Lean doivent être des opérationnels, des gens de terrain, et non que des cadres, qui peuvent être très inhibants et qui prennent parfois comme une remise en cause personnelle le résultat des mesures et des constatations de l’équipe.

Ces opérationnels vont pouvoir s’exprimer sur le processus auquel ils participent, et leurs avis vont vraiment compter. En effet, ce sont eux qui proposent des facteurs influents possibles. Eux qui décrivent le processus tel qu’il est et non tel que l’on aimerait qu’il soit. Ils vont également participer aux mesures, à l’analyse, traquer la non-valeur ajoutée et enfin, proposer des améliorations significatives, et perçeptibles par le client. Puis les mettre en oeuvre, eux-mêmes ! Quoi de plus exaltant que de construire, d’échanger, d’améliorer. Quoi de plus valorisant que de se sentir utile ?

Robert Lamoureux, dans son célèbre « éloge de la fatigue » l’exprimait ainsi :

La fatigue, Monsieur, c’est un prix toujours juste,
C’est le prix d’une journée d’efforts et de luttes.
C’est le prix d’un labour, d’un mur ou d’un exploit,
Non pas le prix qu’on paie, mais celui qu’on reçoit.

L’enthousiasme du pilote Lean

Mais c’est le pilote Lean qui porte cette philosophie, cet enthousiasme collectif. Si le pilote du projet lean est apathique, triste, monotone, rébarbatif, lassant, le projet le sera tout autant. L’équipe, au départ exaltée à la perspective du chantier se démotivera peu à peu. Et le chantier sera un échec. Les détracteurs du Lean en interne (et soyez certains qu’ils sont à l’affût) auront alors beau jeu de dénoncer la méthode et de pointer du doigt l’inévitable échec.

Le pilote Lean doit avoir une foi inébranlable dans ce qu’il dit, et être exemplaire. Comment expliquer que la « voix du client » est fondamentale si lui-même ne veut pas aller voir ou entendre un client ? Comment expliquer que la mesure sur le terrain (gemba) est fondamentale si lui-même ne va pas là où le processus se déroule, dans les ateliers, dans les bureaux, près de opérationnels ? Comment avoir une équipe enthousiaste et motivée si le pilote n’y croit pas vraiment ?

Le charisme ne se commande pas. Mais l’enthousiasme est un état d’esprit, et il est contagieux. Le pilote lean doit donc réellement animer le chantier Lean :

1. Lutter contre les freins inhérents à tout changement : « ça ne marchera jamais », « on n’aura jamais l’accord de la Direction », « tout ça, c’est du blabla », « ça change quoi sur ma feuille de paie », « c’est trop difficile », etc… Convaincre, expliquer, et transmettre sa ferveur.

2. Communiquer en permanence, donner envie, se battre pour faire avancer le chantier. Quand tout le monde est fatigué ou las, ou découragé, le pilote est encore sur la brèche et transmet sa conviction inébranlable dans le but poursuivi et surtout sa confiance dans l’équipe.

3. Stimuler le groupe. Rappeler que l’objectif est atteignable, que ce sera une belle victoire collective

4. Ne pas chercher des coupables, mais regarder devant. Penser en solutions.

5. Ne pas censurer les idées de l’équipe. Ce sont eux qui savent. Ecouter, challenger, discuter.

6. Prévoir des ateliers courts mais réguliers. Tenir ses engagements. Ne pas décaler les ateliers ou revues à la dernière minute : c’est la meilleure façon de montrer que ces ateliers ne sont pas importants.

7. Etre exemplaire. Le mot d’ordre du pilote n’est pas « En avant ! », mais « Suivez-moi ! »

Ne pas appliquer ces préceptes, c’est échouer à coup sûr. Mais c’est surtout décourager les opérationnels de l’équipe, et pour longtemps. Et détruire de la valeur pour l’entreprise et ses clients, en n’utilisant pas les talents.

Le conquérant voit tout comme un défi, alors que pour l’homme ordinaire, tout n’est que bénédiction ou malédiction » Carlos Castaneda.

Le pilote doit être ce conquérant, et entraîner l’équipe vers le sommet, par l’enthousiasme, par l’exemple, par son ardeur, par sa rigueur, et par sa confiance envers l’équipe. Et sa plus belle réussite ne sera même pas l’atteinte de l’objectif, mais le fait que l’équipe porte le projet de façon autonome,  et puisse (presque) se passer de lui.

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